Interview Vincent Valinducq

par | Nov 28, 2023 | Actualité, médecine palliative, soins palliatifs pédiatriques

Aider c’est aimer. C’est juste une lettre qui change.

Pourquoi avoir écrit ce livre ?

L’objectif de ce livre était d’abord de mettre les aidants en lumière. Et le second objectif était d’atteindre les aidants. C’est assez dur de sensibiliser les aidants et de leur mettre le livre entre les mains.

D’un côté, de nombreux médias s’intéressent aux livres :  Le Monde, l’Obs, le Télérama ou le Parisien. Et d’un autre côté, j’ai énormément de retour des aidants. C’est assez incroyable car je ne m’attendais pas à autant de messages positifs. C’est assez fou.

Je pense donc avoir atteint mes deux objectifs.

Qu’est-ce qui a été le plus dur en tant qu’aidant ?

Le plus dur c’est l’isolement car on se sent dans une bulle. Pendant 14 ans, je me suis senti extrêmement seul avec mon frère. Depuis que le livre est sorti, je me rends compte que nous ne sommes pas seuls. Je découvre ce monde des aidants et me rends compte que nous sommes 11 000 000. Je découvre, également, que d’autres personnes ont partagé les mêmes choses que nous. Le témoignage des lecteurs et des aidants est impressionnant. Si j’avais eu ce genre de livre, ça m’aurait aidé. Je me serai senti un peu moins seul.

L’autre difficulté a été la charge de travail. Dans une journée, j’avais trois emplois du temps : le premier de médecin généraliste, le second de chroniqueur à la télévision et le troisième d’aidant. Je n’arrêtais pas. J’étais sous l’eau et complément surchargé. J’étais en permanence en  hypervigilance, c’est -à-dire que j’avais une charge mentale incroyable. Le jour, je faisais des petites notes pour ne rien oublier. La nuit, je regardais mon téléphone pour voir si je n’avais pas manqué un appel de mon père ou de mon frère.

Quand on est aidant, nous avons beaucoup de points communs : la solitude et la surcharge de travail.

Qu’est-ce qui vous a manqué en tant qu’aidant ?

Ce qui m’a manqué c’est de l’aide et principalement de l’aide humaine. Les auxiliaires de vie ou les aides à domicile sont en pénurie. Par manque de recrutement, ils nous arrivaient de ne pas avoir d‘aide à la maison car personne n’était disponible.

La deuxième chose qui m’a manqué c’est de l’information. En tant qu’aidant, vous êtes tellement isolé et un peu perdu. Vous ne savez pas à quelle porte frapper.

En France, il y a un manque d’information des aidants pour sensibiliser à la fois l’aidant et son entourage. Si tout le monde prenait conscience de ce que fait un aidant au quotidien, ça permettrait de faire avancer les consciences et les aides possibles. D’ailleurs, de nombreux aidants ne savent même pas qu’ils sont aidants.

Quels messages pouvez-vous donner aux aidants ?

L’une des premières choses c’est d’accepter d’être aidé. Souvent, on est vraiment sous l’eau et on le sait. Il est nécessaire d’être aidé et d’accepter de l’aide humaine. Ça ne signifie pas que vous êtes faible, que vous n’y arrivez plus ou que vous aimez moins la personne. Au contraire, c’est renforcer l’équipe pour aider au mieux la personne que vous aidez.

Les gens pensent qu’ils ne sont pas à la hauteur quand ils font appel à de l’aide extérieur. Ce n’est pas vrai. Il faut accepter d’être aidé car c’est vraiment compliqué de s’en sortir quand on est seul. Être aidé  permet de se recentrer sur les moments d’échanges avec la personne. Ces moments sont parfois de plus en plus rares. C’était le cas avec ma maman.

Être aidant c’est avoir une santé fragile. Il ne faut donc pas se mettre de côté. Les aidants s’inquiètent surtout pour la personne aidée et ils ne s’écoutent plus trop. Je pense que c’est bien d‘aller voir son généraliste pour faire le point, faire les dépistages et voir si nous sommes en bonne santé. C’est vraiment capital d’être bien pour pouvoir aider au mieux la personne qui en a besoin.

Je parlerai aussi de l’accompagnement psychologique. Je pense que c’est bien de pousser la porte d’un psychologue. Tout ce que vous êtes en train de faire pour le proche que vous accompagnez, n’est pas une chose normale. C’est de l’amour, bien sûr mais ça a des conséquences sur votre physique et votre mental. Être accompagné par un psychologue, des centres médicaux psychologiques, des associations ou des groupes de parole, c’est essentiel pour verbaliser et ainsi évacuer.

En page 185, vous évoquez les soins palliatifs. Votre maman a-t ’elle bénéficié de soins palliatifs ?

Maman a été à la maison jusqu’à la fin. Quand son état a commencé à bien se dégrader, nous avons eu l’accompagnement de l’équipe mobile en soins palliatifs. L’équipe mobile est venue à la maison. Elle a évalué la situation et a beaucoup échangé avec mon papa. C’était intéressant et important pour mon père, cet accompagnement. Il a pu comprendre les enjeux et poser ses questions. Il y a eu beaucoup de bienveillance et d’écoute.

De mon côté, j‘ai pu appeler facilement l’infirmière en soins palliatifs qui échangeait à la fois avec le médecin en soins palliatifs et notre médecin généraliste. Il y a eu une belle coordination entre les différents acteurs.

Nous avons eu la chance de pouvoir échanger et être suivi avec les équipes mobiles. Pour moi, c’était indispensable et nécessaire. Et pour ma maman, ça lui a fait beaucoup de bien.

Je ne vous le souhaite pas, mais si c’était à refaire, que changeriez-vous ?

Je le referai de la même façon. La seule chose, c’est que j’activerais les aides plus rapidement. Les temps de traitement pour les dossiers sont longs et il ne faut pas hésiter à les faire en amont. Je pense que c’est capital d’être aidé.

J’aurais peut-être du prendre plus de temps pour moi. Mais je sais que lorsqu’on est dedans, nous avons du mal à prendre le recul nécessaire. Ce sont des conseils qu’il faut essayer de s’appliquer sans culpabiliser. Quand vous vous absentez une heure pour un footing, aller voir la mer ou prendre un café, cela ne va pas changer le cours des choses. Par contre, ça peut vous faire beaucoup de bien.

Avez-vous un dernier message ?

Moi je ne m’en rendais pas compte quand on disait à mon frère et moi : « Bravo les garçons, pour ce que vous faites, c’est juste incroyable ». Maintenant, je réalise qu’on a fait des sacrifices mais on a fait de belles choses. Aujourd’hui, j’en suis très fier.

Quand on est aidant, on ne se rend pas compte. Nous sommes toujours un peu durs avec nous-mêmes. On a l’impression que ça n’est jamais assez mais c’est déjà énorme ce que font les aidants.

Mes parents sont partis depuis plus d’un an. C’est une étape qui est douloureuse. Bien sûr qu’ils me manquent. A l’inverse, pendant 14 ans, mon père, mon frère et moi autour de ma maman, nous avons toujours été très unis. Aujourd’hui, je n’ai aucun regret et aucun remords. Je suis en paix avec tout ce qui s’est passé.

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